Clarice Lispector : au cœur de la tempête tranquille

Ouvrez une page de Clarice Lispector et il ne semble pas se passer grand-chose. Quelqu’un prépare du café. Une femme regarde un cafard. Une fille tient un œuf. Puis, presque silencieusement, le sol d’une vie bouge. Les gestes ordinaires deviennent des détonateurs. Le talent de l’écrivain est de saisir l’instant où une pensée va trop loin pour pouvoir revenir en arrière.

Il n’est pas nécessaire d’être philosophe pour la lire. Il suffit d’un peu de patience et de curiosité pour les états d’âme. Au lieu de grands rebondissements, Clarice Lispector offre de petites prises de conscience irréversibles : un personnage se comprend, se méfie de lui-même ou se sent soudainement nu devant le monde. Ce changement peut tenir en une seule phrase, mais il résonne pendant des pages.

Cet article se veut un guide d’approche en douceur. Nous esquissons d’abord qui était l’auteure et comment ses premières années – migration, pauvreté, études, journalisme – ont nourri ses livres ultérieurs. Nous parcourons ensuite les trois phases de sa vie, afin que vous sachiez où se situe chaque œuvre majeure.

Si vous avez déjà ouvert La Passion selon G.H. ou Agua Viva et que vous vous êtes retiré, cette carte est faite pour vous. Nous vous suggérons un point d’entrée plus accessible, vous montrons à quoi vous attendre et vous indiquons où vous reposer. Si vous êtes le genre de lecteur qui apprécie l’intensité intérieure, vous aimerez peut-être aussi 👉 La Promenade au phare de Virginia Woolf. Un autre voyage où une journée en famille et quelques silences recèlent toute une tempête.

Portrait de Clarice Lispector

Livres et biographie de Clarice Lispector

  • Nom complet et pseudonymes : Clarice Lispector ; quelques articles journalistiques occasionnels sous des pseudonymes, mais des œuvres de fiction signées Clarice Lispector.
  • Naissance et décès : née le 10 décembre 1920 à Chechelnyk (alors en Ukraine, qui faisait partie de l’Empire russe) ; décédée le 9 décembre 1977 à Rio de Janeiro, au Brésil.
  • Nationalité : naturalisée brésilienne, d’origine juive ukrainienne.
  • Père et mère : Pedro Lispector ; Mania Lispector.
  • Épouse ou époux : mariée à Maury Gurgel Valente (diplomate) en 1943 ; divorcée par la suite.
  • Enfants : deux fils : Pedro et Paulo (Pau).
  • Mouvement littéraire : Associée au modernisme brésilien et à la fiction expérimentale d’après-guerre ; souvent qualifiée d’introspective ou d’existentielle, bien qu’elle ait résisté aux catégories rigides.
  • Style d’écriture : Prose radicalement intérieure, monologue fragmenté, imagerie métaphysique, accent mis sur les gestes quotidiens qui déclenchent des prises de conscience profondes.
  • Influences : Écrivains modernistes et existentiels (par exemple, Woolf, Kafka), langage biblique, vie urbaine brésilienne, héritage juif.
  • Récompenses et distinctions : A reçu les principaux prix littéraires brésiliens (par exemple, le prix Graça Aranha à ses débuts) ; plus tard, canonisation critique comme l’une des plus grandes écrivaines brésiliennes du XXe siècle.
  • Adaptations de son œuvre : Films et adaptations théâtrales de L’Heure de l’étoile et d’autres œuvres ; fréquemment inclus dans les programmes universitaires du monde entier.
  • Controverses ou défis : A vécu en tant qu’immigrante et membre d’une minorité ; a parfois connu des difficultés financières ; a survécu à un grave accident avec brûlures ; a dû faire face à la maladie (cancer) vers la fin de sa vie.
  • Carrière en dehors de l’écriture : Journaliste, traductrice et autrice pour la radio ; a travaillé pour des journaux et des magazines au Brésil et à l’étranger.
  • Ordre de lecture recommandé :
  • 1. Liens familiaux
  • 2. L’Heure de l’étoile
  • 3. Près du cœur sauvage
  • 4. La Passion selon G.H.

Du passage de la frontière aux livres empruntés

Clarice Lispector commence son enfance entre deux mondes. Née dans une famille juive dans ce qui est aujourd’hui l’Ukraine et amenée au Brésil alors qu’elle était encore bébé, elle grandit avec la migration comme premier souvenir, même si elle ne se souvient pas du voyage lui-même. À la maison, il y a des histoires en yiddish, des soucis d’argent et une mère dont la maladie assombrit la maison. Dehors, il y a le portugais dans la rue, le soleil sur les murs et le sentiment que la langue peut être une porte.

Recife devient le véritable premier paysage. Les marchés, les cours d’école et la logique de la pauvreté quotidienne forment l’attention de la jeune fille. Elle écoute attentivement, non seulement les mots, mais aussi les pauses et les lapsus. La famille déménage à nouveau, cette fois à Rio de Janeiro, apportant avec elle de l’espoir, des dettes et une valise remplie d’habitudes.

La faculté de droit est à la fois un ascenseur social et un point de vue privilégié. Les cours sur les codes et les droits côtoient des nuits d’écriture frénétique et solitaire. L’auteure s’essaie au journalisme. Elle apprend à respecter les délais et à couper une phrase à l’os sans lui faire perdre son mordant. Les interviews, les portraits et les chroniques lui apprennent à écouter les contradictions et à se fier aux détails insolites comme véritable centre d’une histoire.

Au moment où Près du cœur sauvage paraît, les ingrédients sont déjà mélangés. La double vision d’une immigrante, l’intelligence brute d’une jeune fille, la formation juridique et journalistique d’une jeune femme et un désir farouche d’écrire ses pensées de l’intérieur.

Valises diplomatiques et pages qui ne se comportent pas comme il faut

Son mariage avec un jeune diplomate fait quitter le Brésil à Clarice Lispector pour une série de villes étrangères. Nouvelles langues, appartements froids, réceptions à l’ambassade. Sur le papier, cela semble glamour. Mais à l’intérieur, l’écrivain se sent exilée du portugais dont elle a besoin pour penser. Tandis qu’une vie assiste à des réceptions, une autre reste seule, rédigeant des romans qui refusent presque d’être des intrigues.

Les premiers livres marquent cette période intermédiaire agitée. Près du cœur sauvage fait exploser le récit conventionnel avec les pensées errantes et lumineuses d’une jeune fille. Le Lustre et La Ville assiégée continuent à tordre le réalisme jusqu’à ce qu’il semble légèrement incliné, comme si les meubles pouvaient glisser. Plus tard, La Pomme dans le noir et La Passion selon G.H. explorent la culpabilité, la liberté et le vide terrifiant qui se cache derrière les tâches ordinaires.

Le journalisme reste en parallèle. Les chroniques et les crônicas l’entraînent à écrire des phrases qui marchent dans la rue, et pas seulement dans les séminaires de philosophie. Elle interviewe des politiciens et des artistes, rend ses articles à temps et apprend toute l’intensité que peut contenir un espace réduit. Le travail de traduction ajoute une autre dimension.

À la fin de cette phase, Clarice Lispector mène deux vies qui ne cessent de s’entrechoquer. Celle d’une femme de diplomate et celle d’une romancière expérimentale animée d’une tempête intérieure silencieuse. La seconde l’emporte, ligne après ligne.

Le feu, les fragments et les dernières pièces exiguës

Finalement, le mariage diplomatique prend fin. L’écrivaine retourne à Rio, désormais mère célibataire avec deux fils, des soucis financiers et une réputation grandissante. Elle écrit chez elle, souvent la nuit, envoyant des crônicas aux journaux qui deviendront plus tard le volume Discovering the World. De petites observations se transforment en radiographies de la peur, de la joie et de l’ennui.

Un accident domestique au milieu des années 1960 laisse Clarice Lispector gravement brûlée, manquant de perdre une main. La convalescence est longue et douloureuse. Le corps, déjà au centre de sa fiction, devient un lieu de feu et de cicatrices littérales. Après cela, les pages semblent encore plus proches du nerf. Água Viva se lit comme une longue inspiration et expiration, une voix essayant de parler du moment présent au fur et à mesure qu’il se déroule.

La maladie se rapproche. Un cancer de l’ovaire est diagnostiqué tardivement. La maladie se propage. Même depuis l’hôpital, elle dicte des fragments à une amie proche, qui deviendront A Breath of Life, un dialogue entre une autrice et sa création sur l’acte même d’exister. Clarice Lispector meurt en 1977, un jour avant ses cinquante-sept ans.

Ce qui reste de cette période tardive, c’est le sentiment d’une écriture pressée contre le bord de la vie. Des livres plus courts, des enjeux plus aigus, des questions plus exposées : qu’est-ce qu’un « moi » ? Combien de souffrance un mot peut-il contenir ? Où va l’amour quand le langage échoue ? Les pièces sont plus petites, mais la tempête à l’intérieur est plus forte que jamais.

Entre Woolf, Rosa et l’indicible

Les critiques classent souvent Clarice Lispector parmi les modernistes et les écrivains existentialistes du XXe siècle, mais elle ne correspond tout à fait à aucune catégorie. Au Brésil, elle partage la même époque que la folie linguistique de Guimarães Rosa et la précision sèche de João Cabral de Melo Neto, mais son obsession n’est ni le paysage ni la structure sociale. Au contraire, elle écrit juste avant qu’une pensée ne devienne une phrase, quand tout semble instable.

Les thèmes se répètent comme une liturgie privée. L’épiphanie dans les petits gestes est centrale. Casser un œuf, manger un sandwich, observer un animal. De tels actes déclenchent des révélations qui peuvent être mystiques, terrifiantes, ou les deux à la fois.

Le genre et la classe sociale ne sont pas ici des abstractions. La plupart des protagonistes de Clarice Lispector sont des femmes issues de la classe moyenne ou moyenne inférieure qui vivent dans des appartements, des bureaux ou des cuisines, soumises à des attentes qui ne correspondent pas à leur vie intérieure. L’espace domestique devient une cocotte-minute.

Pour découvrir une autre écrivaine qui transforme la philosophie en expérience féminine vécue, lisez Elle est venue pour rester de Simone de Beauvoir. Un roman où la jalousie, la liberté et l’engagement s’affrontent dans la vie quotidienne. La comparaison permet de mettre en évidence ce qui rend Clarice Lispector unique.

Illustration pour L'Heure de l'étoile de Lispector

Livres célèbres de Clarice Lispector

  • 1943 — Perto do Coração Selvagem (Près du cœur sauvage) — Premier roman sur Joana, dont la conscience vagabonde et aiguë brise les schémas traditionnels.
  • 1946 — O Lustre (Le Lustre) — La vie intérieure d’une jeune femme se dévoile dans une prose dense et atmosphérique qui questionne la mémoire, la famille et l’identité.
  • 1949 — A Cidade Sitiada (La Ville assiégée) — Une ville et une jeune fille grandissent ensemble dans un récit qui brouille les changements extérieurs et la perception intérieure.
  • 1960 — Laços de Família (Les liens familiaux) — Recueil de nouvelles où des scènes quotidiennes — trajets en bus, déjeuners, visites — explosent en des prises de conscience troublantes.
  • 1964 — A Paixão segundo G.H. (La Passion selon G.H.) — Une femme est confrontée à un cafard dans la chambre d’une femme de ménage et entre dans une crise spirituelle et existentielle radicale.
  • 1969 — Uma Aprendizagem ou O Livro dos Prazeres (Un apprentissage ou Le Livre des plaisirs) — Une histoire d’amour hésitante qui devient une méditation sur le désir, la solitude et l’apprentissage du « oui » à la vie.
  • 1971 — Felicidade Clandestina (Joie clandestine) — Histoires sur l’enfance, l’envie et le bonheur secret que peuvent apporter les livres et les petites rébellions.
  • 1973 — Água Viva (Água Viva / Le Ruisseau de la vie) — Monologue qui brouille les genres et tente de capturer la conscience au présent, sans intrigue.
  • 1977 — A Hora da Estrela (L’Heure de l’étoile) — Roman court dans lequel le destin d’une jeune femme pauvre est raconté — et mal géré — par un écrivain tourmenté et conscient de lui-même.

Influences sur Clarice Lispector – au cœur de la tempête tranquille

Les critiques aiment placer Clarice Lispector dans une lignée bien ordonnée, mais elle ne cesse de s’en échapper. Certains fils conducteurs sont néanmoins évidents. Son héritage juif et sa cadence biblique confèrent à son langage un sens de l’adresse et de la sévérité — les questions sur Dieu, la culpabilité et la miséricorde apparaissent sans doctrine. Sur le plan littéraire, on la sent en conversation avec :

  • Virginia Woolf : le temps intérieur, la conscience changeante et la façon dont une journée peut contenir une vie. Clarice Lispector va plus loin, dépouillant les détails sociaux jusqu’à ce qu’il ne reste plus que la pensée, le corps et quelques objets.
  • Franz Kafka : l’éloignement et l’étrange dans des pièces ordinaires. L’écrivain partage son sentiment que l’existence peut soudainement basculer dans l’absurde, bien que son ton soit souvent plus intime et plus physique.
  • James Joyce (ses débuts) – en particulier l’idée de « l’épiphanie » : un petit déclencheur extérieur qui fait éclater la vie intérieure. Là où Joyce s’appuie sur le bruit de la ville, Clarice insiste sur l’instant unique et vibrant.
  • Les modernistes brésiliens comme Guimarães Rosa et João Cabral de Melo Neto – ils lui montrent qu’il est possible de renouveler le portugais de l’intérieur : Rosa par le langage inventé, Cabral par des lignes sèches et précises.

Sur le plan philosophique, elle est proche des penseurs existentialistes, en particulier en ce qui concerne la liberté, la nausée et la responsabilité, mais elle argumente rarement en termes abstraits. Au contraire, elle laisse les corps et les petits gestes porter ces questions. Pour un parallèle dans la fiction où la philosophie vit dans l’expérience quotidienne d’une femme, voir L’Invitée de Simone de Beauvoir. La comparaison montre clairement que Clarice Lispector choisit moins le programme, plus la rencontre brute.

Après Clarice : les écrivains qui entendent l’écho

De nombreux écrivains ont découvert Clarice Lispector non pas à l’école, mais lors de lectures nocturnes, et on peut entendre le choc dans leurs essais : « Je ne savais pas que la prose pouvait faire cela. » Son influence tient moins à un style que l’on peut copier qu’à une permission :

  • Hélène Cixous a écrit avec passion sur Clarice Lispector, la traitant comme une sorte d’ancêtre secrète de l’écriture féminine. On peut sentir l’écho dans les hybrides de Cixous, entre essai, histoire et rêve.
  • Lygia Fagundes Telles, une autre grande écrivaine brésilienne, partage cette volonté de laisser la subjectivité féminine et l’ambiguïté morale prendre le dessus, même si ses intrigues restent plus proches du réalisme.
  • Carolina Maria de Jesus (dans un registre très différent) place également l’expérience féminine au centre, transformant son journal intime et ses épreuves vécues en littérature. Clarice contribue à élargir l’horizon de ce à quoi peut ressembler l’écriture « sérieuse » des femmes brésiliennes.
  • Les auteurs contemporains latino-américains et lusophones qui travaillent avec des fragments, des carnets ou des monologues intimes, en particulier les femmes, citent ou font souvent écho à Clarice Lispector lorsqu’ils assouplissent la structure et intensifient la concentration.
  • Les romanciers et essayistes anglophones qui accordent de l’importance à la « réflexion sur la page » la citent souvent comme référence pour écrire sur la conscience sans la réduire à une simple explication.

Des pièces où la pensée s’exprime en premier

Les pages de Clarice Lispector donnent l’impression que le narrateur réfléchit sous nos yeux. La voix oscille souvent entre la première et la troisième personne : « je » se transforme en « elle », puis revient à « je », comme si l’histoire ne parvenait pas à déterminer où s’arrête le moi et où commence le personnage. Ce point de vue instable nous permet de ressentir à quel point l’identité est fragile de l’intérieur.

Le point de vue reste très proche. Le discours indirect libre dissout la frontière entre le narrateur et le personnage. Les doutes, les flashs de mémoire et les intuitions soudaines s’immiscent sans guillemets. L’effet n’est pas le chaos, mais un murmure intérieur continu. Les événements extérieurs n’apparaissent que lorsqu’ils frappent la conscience.

Le temps s’écoule rarement de manière linéaire. Une action présente peut déclencher de longues spirales vers le passé et l’avenir imaginé, puis revenir en arrière presque sans avertissement. Ces détours ne sont pas des flashbacks au sens habituel du terme. Ce sont des tests de la signification du moment présent.

Pour terminer une scène, elle choisit souvent une hésitation plutôt qu’une conclusion. Un personnage arrive au bord d’une prise de conscience, puis recule ou reste stupéfait. Le « et maintenant ? » est laissé au lecteur. Ce caractère inachevé semble fidèle à la pensée vécue, qui se résout rarement dans les délais prévus.

Si vous êtes habitué aux romans où l’intrigue prime, cela peut être déconcertant. Il est utile de lire lentement et d’accepter que les événements principaux sont invisibles. Changements de croyances, d’image de soi ou de température spirituelle.

Des phrases à la limite du discours

À première vue, les phrases de Clarice Lispector peuvent sembler simples. Beaucoup sont courtes, déclaratives, presque enfantines. Puis une image surgit et bouleverse tout. Une grammaire simple, des métaphores vertigineuses sont au cœur de son écriture. Un mot comme « ça » ou « chose » peut porter une demi-page de tension. Un adjectif courant (« clair », « vivant », « brut ») prend soudain une dimension métaphysique.

La syntaxe s’étire et se contracte sous la pression intérieure. Quand une pensée hésite, la ponctuation bégaye : tirets, ellipses, faux départs. Quand la certitude envahit le texte, la phrase se coupe net. On peut souvent deviner l’état d’esprit d’un personnage à la fluidité ou à la discontinuité du texte.

Les images sont concrètes mais chargées. Œufs, insectes, cheveux, miroirs, animaux, objets bon marché. Chaque élément devient une lentille sur l’existence elle-même. Un cafard n’est pas un symbole au sens académique du terme. C’est une présence qui oblige le protagoniste à affronter le non-humain, l’abject, le divin. Les sensations liées à la nourriture et au corps ancrent certains des passages les plus abstraits afin que le lecteur ne s’éloigne jamais trop du monde physique.

C’est dans le ton que les choses deviennent glissantes et puissantes. Il peut passer de presque comique à pieux en un paragraphe. L’ironie ne devient jamais suffisante ; elle a tendance à se retourner vers l’intérieur, comme une suspicion de soi.

Pour découvrir un autre écrivain qui condense un énorme poids émotionnel et philosophique dans une prose épurée et lumineuse, vous pouvez vous tourner vers L’Amant de Marguerite Duras. La comparaison met en évidence la manière dont Clarice Lispector choisit des contours plus rugueux, des rebondissements plus étranges et un risque métaphysique plus ouvert.

Citation de Clarice Lispector

Citations célèbres de Clarice Lispector

  • « Je n’atteins la simplicité qu’au prix d’énormes efforts. » La simplicité ici n’est pas de la naïveté. C’est la surface durement acquise d’un sentiment très complexe.
  • « La liberté ne suffit pas ; ce que je veux, c’est un sens. » Cette phrase met en évidence son obsession centrale. La liberté est importante, mais sans sens, elle reste un vide.
  • « J’écris comme pour sauver la vie de quelqu’un. Probablement la mienne. » L’écriture devient une question de survie. Chaque page est un moyen de maintenir un peu plus longtemps la cohérence d’un moi fragile.
  • « Je n’ai pas peur du noir. J’ai peur de ce qui se trouve dans le noir. » La peur ne concerne pas les objets, mais les possibilités. La conscience amplifie les ombres en questions.
  • « Je suis si mystérieuse que je ne me comprends même pas moi-même. » Plutôt que de prétendre se connaître, elle se penche sur l’incertitude comme une condition permanente.
  • « Je ne sais pas ce que je recherche, mais je sais que je ne suis pas satisfaite. » L’agitation devient une méthode. Le travail continue d’avancer parce que les questions continuent d’avancer.
  • « Parfois, je me sens si pleine que je pense que je vais exploser de lumière. » L’abondance intérieure peut être aussi insupportable que le vide.

Faits anecdotiques sur Clarice Lispector

  • Bébé réfugiée, cœur brésilien : Clarice Lispector est arrivée au Brésil alors qu’elle était encore un bébé juif réfugié d’Europe de l’Est. Plus tard, elle a insisté sur le fait qu’elle se sentait entièrement brésilienne et a été surprise lorsqu’on lui a rappelé qu’elle n’était pas née là-bas. 🌐 Les profils biographiques mentionnent la migration et la naturalisation.
  • Le droit avant la littérature : elle a étudié le droit à Rio de Janeiro, et non la littérature. Sa formation en matière d’arguments, de preuves et de responsabilité a contribué à façonner la pression morale dans ses œuvres de fiction, où la culpabilité et le choix ressemblent à des affaires judiciaires entendues dans l’esprit.
  • Une bougie qui a changé les pages : un accident nocturne avec une bougie a mis le feu à sa chambre et lui a causé de graves brûlures. La longue convalescence et la menace qui pesait sur sa main d’écriture ont renforcé l’urgence et l’attention portée au corps dans ses œuvres ultérieures.
  • Un roman similaire à associer à son œuvre : si vous aimez les histoires où très peu de choses « se passent » à l’extérieur, mais où tout change à l’intérieur, essayez 👉 Moderato Cantabile de Marguerite Duras comme lecture complémentaire.
  • Pression morale à une échelle civique plus large : Les lecteurs attirés par l’intense questionnement intérieur de Clarice Lispector réagissent souvent à l’assaut éthique et sensoriel de 👉 L’Aveuglement de Jose Saramago, où toute une société est poussée à ses limites.

Comment la tempête s’est propagée

De son vivant, elle a intrigué de nombreux lecteurs brésiliens. Certains critiques y voyaient du génie, d’autres se plaignaient que ses livres étaient trop « hermétiques » ou « étrangers ». Au fil du temps, en particulier à partir des années 1960, une nouvelle génération de critiques et d’écrivains a commencé à reconnaître la profondeur de son travail sur la conscience, le genre et le langage.

Les éditions plus récentes, y compris les nouvelles traductions anglaises, ont rendu sa voix plus percutante et plus fidèle à l’étranger, ce qui a suscité un regain d’intérêt au XXIe siècle. Aujourd’hui, elle figure régulièrement sur les listes des écrivains mondiaux incontournables et est enseignée aux côtés de figures telles que Woolf, Kafka et Beckett dans les cours de littérature moderne.

  • Une bonne encyclopédie ou un bon dictionnaire sur la vie et l’œuvre de Clarice Lispector.
  • Les essais d’Hélène Cixous et d’autres critiques qui la considèrent comme une figure fondatrice de l’écriture expérimentale féminine.
  • Les préfaces et postfaces des traductions récentes, qui fournissent souvent un contexte clair et accessible sur son style et son époque.

Si vous voulez découvrir à quel point la fiction philosophique peut également être profondément sociale, vous pouvez lire Blindness de Jose Saramago après l’un des livres courts de Clarice Lispector.

Que garder et par où commencer ce soir

Clarice Lispector écrit à partir de ses tripes. Les intrigues sont minces, les scènes sont courtes, mais les enjeux sont énormes car ils concernent ce que signifie être soi-même. Ses outils sont d’une simplicité trompeuse — grammaire simple, objets du quotidien, épisodes courts — mais ils sont utilisés pour aller au cœur d’expériences que de nombreux romans ne font qu’effleurer.

  • Commencez par les nouvelles de Family Ties ou Covert Joy, de brefs chocs où un trajet en bus, une visite ou la jalousie d’un enfant se transforment en révélation.
  • Passez ensuite à L’Heure de l’étoile, un court roman dont le narrateur est aux prises avec la responsabilité envers une jeune femme pauvre qu’il invente et néglige à la fois.
  • Essayez ensuite Near to the Wild Heart, où l’esprit d’une jeune fille refuse de se conformer à la vie qui lui est imposée.
  • Lorsque vous vous sentez prêt pour une intensité maximale, passez à La Passion selon G.H. ou Água Viva, où presque rien ne se passe au sens extérieur et où tout se passe intérieurement.

Conseils de lecture : allez-y doucement. Une histoire, un chapitre, voire quelques pages à la fois suffisent. Remarquez quel objet maintient la tension. Un œuf, un insecte, un miroir.

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